Koekelberg, le 21 octobre 2009. Lors des célébrations du centenaire de Kiewit, nous avons notamment admiré la magnifique réplique du Blériot XI de la Fondation néerlandaise Early Birds. Les festivités commémorant le premier vol transmanche de Louis Blériot sont également encore présentes dans nos mémoires. Dans toute cette agitation, avions-nous oublié notre constructeur belge de Blériot XI ?
Les plans allemands
Antoine Neckelbrouck est passionné depuis longtemps par Blériot. Au début des années 1970, il se met à la recherche des plans d'un Blériot XI. Accompagné de son épouse Idette, qui est aussi sa secrétaire efficace, il se rend au Musée allemand des Métiers de la Nature et de la Technologie de Munich.www.deutsches-museum.deIl reçut des copies des plans originaux de Blériot, sept en tout. Elles furent ensuite versées à la Shuttleworth Collection (www.shuttleworth.org/shuttleworth_home.asp) à l'aérodrome d'Old Warden (Bedfordshire) pour observer un Blériot XI et prendre les mesures finales. Il a ensuite converti tous les plans et ses propres figures en dessins de construction exploitables. En 1975, Antoine a présenté son projet à Ir. Meurrens, de l'Air Board. Agréablement surpris, ils ont pu commencer la construction de sa réplique statique.
![]() | Antoine Neckelbrouck avec une maquette du Blériot. Sur la table se trouve l'un des nombreux plans qu'il a dessinés lui-même. Il a consacré 169 heures à ce dessin au crayon, et 43 heures supplémentaires ont été nécessaires pour le transposer à l'encre de Chine. |
Antoine : « J’ai commencé par dessiner toutes les pièces, taille réelle, sur du papier kraft. J’ai posé ces dessins sur de longues tables en bois faites maison. J’ai percé les dessins sur les tables ; grâce aux trous dans les planches, j’ai pu les copier sur le bois. J’ai ensuite installé des gabarits sur ces tables ; j’ai tout fabriqué moi-même. » La fabrication et le montage des gabarits demandent évidemment beaucoup de travail. Cette méthode présente le grand avantage de pouvoir les utiliser ultérieurement pour réaliser rapidement et précisément plusieurs copies de ce délicat avion.
![]() | Le fuselage, fixé à un gabarit métallique, repose sur une longue table de travail. L'aile gauche est fixée au fuselage, et l'aile droite est également prête à être installée. |
Déménagement
La construction de la réplique a commencé dans un hangar à Aspelare, entre Grammont et Ninove.
Lorsque le propriétaire a refusé de renouveler le bail de l'entrepôt, Antoine a décidé de rénover un vieux bâtiment à Koekelberg. Le déménagement d'Aspelare à Koekelberg a duré près de deux ans. Le déplacement des longs établis, en particulier, s'est avéré un défi de taille. Son espace de travail de 28 mètres sur 8,5 mètres est désormais situé au premier étage d'un parking. Il y fait sec, chaud et confortable. Un système de grue mobile permet de hisser le matériel nécessaire et de descendre ensuite l'avion terminé au rez-de-chaussée.
![]() | Un moteur est déjà prêt : un VW 1 800 cm³ testé sur un ULM. Un moteur Anzani trois cylindres d'origine de 25 ch est malheureusement difficile à trouver, voire hors de prix. Antoine fera fabriquer l'hélice ailleurs, peut-être chez Poncelet à Evere. |
![]() | Le réservoir de carburant, réalisé en tôle de cuivre d'un millimètre d'épaisseur, est terminé depuis 1991. Antoine a d'abord consacré 15 heures à la conception du projet. Le réservoir lui-même a été soudé à l'étain et a été achevé après 25 heures de travail. |
Bois de qualité
Les principaux matériaux utilisés pour ce Blériot sont le hêtre, le peuplier et le bois lamellé-collé. Le rabot d'origine était en pin, en frêne et en peuplier. Antoine : « J'achète le peuplier chez un grossiste réputé. Nous laissons sécher les planches épaisses, brutes de sciage, pendant un an. Ce n'est qu'après qu'elles peuvent être utilisées pour le Blériot. Je suis très exigeant quant au bois. Il doit être de haute qualité, sans nœuds. » Antoine utilise une très bonne colle à bois, pas de colle spéciale aéronautique.
Le soudeur devient charpentier
Antoine est soudeur de formation. Il forme des étudiants à son métier depuis dix-sept ans. J'ai été visiblement surpris qu'une personne aussi experte en métallurgie soit aussi experte en travail du bois. Antoine : « Quand j'enseignais, j'avais une demi-journée de congé par semaine. Je pouvais la passer dans notre section de menuiserie. Pendant que les étudiants suivaient les cours de mes collègues, j'essayais d'en apprendre le plus possible sur la menuiserie. »
![]() | Les gabarits sont également très esthétiques. Voici un gabarit en bois pour une nervure d'ascenseur. La nervure est pressée dans le gabarit à l'aide des quatre blocs de bois situés en bas. |
![]() | Antoine a fabriqué lui-même la plupart des pièces métalliques. Les pièces noires du bas (charnières de gouverne, charnières entre le fuselage et la gouverne) doivent encore être fixées à l'arrière du fuselage. Le crochet noir du bas est une pièce d'origine d'un Blériot. Il est intéressant de comparer ce bijou avec les pièces récemment fabriquées. Il est clair que la mécanique du premier Blériot était moins précise que celle de notre restaurateur à Koekelberg. Blériot n'avait pas non plus de comité de contrôle technique pour surveiller ses performances. On voit ici une section de la gouverne de profondeur et la charnière en aluminium entre la gouverne de direction mobile et le stabilisateur horizontal. |
Ouvrages d'art
Toutes les pièces réalisées par Antoine sont de véritables joyaux artisanaux. Chaque pièce est marquée. Les ailes ne contiennent ni vis ni clous ; tout a été soigneusement collé à l'aide de gabarits, principalement en métal. L'une des ailes est probablement nue, ce qui permet d'en admirer plus clairement le magnifique intérieur. Les ailes sont en peuplier et en bois collé.
Antoine a fait fabriquer certaines pièces sur mesure, comme le mécanisme du manche. Il va sans dire que ces pièces sur mesure sont très coûteuses. Antoine : « Mieux vaut ne pas trop calculer les coûts, sinon ça ne sert à rien. » Plusieurs exemplaires de certaines pièces ont été commandés immédiatement. Il travaille actuellement sur les dernières pièces en bois de l'avion, à savoir la queue avec la gouverne de profondeur et la gouverne de direction.
![]() | L'aile droite du Blériot selon le gabarit. Tous les supports en métal blanc ont été fabriqués par Antoine. Il a également fabriqué de nombreux outils. Le gabarit du gouvernail sera placé sur la plaque blanche à l'avant. |
Antoine a suivi avec un intérêt exceptionnel les vols commémoratifs du centenaire du premier survol de la Manche (25 juillet 1909). Il a visité le site du décollage de Louis Blériot (Les Baraques(aujourd'hui Blériot-Plage) comme lieu du débarquement brutal à Douvres. Il a pu comparer minutieusement sa réplique avec celles en vol. Antoine travaille avec une grande perfection, essentielle à une bonne restauration. Son travail vaut vraiment le détour.
Remerciements à Antoine Neckelbrouck (Basilieklaan 347B30, Koekelberg. Tél./Fax 02 414 79 50). Les visiteurs sont les bienvenus. Pour des raisons d'organisation, une association a été créée autour de sa réplique : « Les Compagnons de l'Aviation Ancienne ». Vous pouvez soutenir le projet d'Antoine en achetant de magnifiques cartes postales de son Blériot après votre visite.
![]() | Un coin ludique dans l'atelier d'Antoine. Des bouteilles de vin « Escadrille » et « Le Looping » de différents millésimes témoignent de ses visites à la collection de l'Amicale Jean-Baptiste Salis.www.ajbs.fr). |
Frans Van Humbeek
Photos : Paul Van Caesbroeck









